Analyse des élections municipales du 6 novembre 2005 dans l’arrondissement Sud-Ouest

par Marcel Sévigny
le 25 novembre 2005

Élection municipale -
Le Sud-ouest s’enligne sur l’Hôtel de ville

Tout le monde se souvient de la « passionnante » campagne électorale municipale ! L’équipe Bourque/vision Montréal, malgré sa déconvenue montréalaise, et à la suite du recomptage qui s’est terminé le 24 novembre, a réussit à obtenir 3 des 5 sièges de l’arrondissement Sud-ouest. Toutefois, c’est Jacqueline Montpetit de l’UCIM qui occupera le poste de maire d’arrondissement l’ayant emporté par 38 voix.

À Montréal, c’est l’UCIM du maire Tremblay qui a consolidé son pouvoir sur la ville. Pour sa part le nouveau parti Projet Montréal a percé avec une récolte d’un peu plus de 10% des votes et un seul élu, son chef Richard Bergeron (au moment ou j’écris ces lignes).

Au delà du grand cafouillage de notre démocratie devenue électronique (comme dirait le journaliste Yves Boisvert : il n’y avait pas de problème et on en a créé un), et des larmoiements sur les faibles taux de participation, les pions se sont quelque peu déplacés sur l’échiquier dans le Sud-Ouest, mais sans que cela ne constitue un potentiel changement de cap dans l’arrondissement. Après des péripéties burlesques dans les recomptages la mairesse Jacqueline Montpetit a finalement vu son cheval (L’UCIM de Gérald Tremblay) gagner par un nez au fil d’arrivée. Il s’agit peut-être d’un résultat étonnant pour une élue qui critiquait férocement le maire voilà encore quelques mois avant sa défection de Vision Montréal.

Même s’il n’y a eu aucune cabale « populaire » contre la candidate mairesse, son refus maintes fois exprimé de se positionner comme élue locale sur la question du déménagement du casino, lui a sans aucun doute coûté des appuis électoraux qui ont failli lui souffler la victoire. Elle en a été quitte pour une bonne peur.

L’affaire du casino est devenue depuis le printemps une question majeure qui préoccupe les citoyens-nes. À preuve la pétition contre le déménagement du casino a été signée par plus de 4 247 personnes du quartier au moment de son dépôt à la députée Nicole Loiselle le 14 novembre dernier. Jacqueline Montpetit a préféré rester derrière la ligne du CHEF (Bourque avant et Tremblay par la suite) et de ses « 2 partis » plutôt que de se positionner plus près des préoccupations des gens. Opportunisme politique, plan de carrière ! Toujours est-il qu’elle a failli en payer le prix politique dans les urnes, ce qui ne signifie pas qu’elle n’en paiera pas le prix sur le terrain politique, si le quartier s’organise en conséquence. On y reviendra plus loin.

Entre temps, il faut noter que traditionnellement le vote dans le district Pointe Saint-Charles est toujours de 2 à 3% moins élevé que la moyenne de Montréal. C’est ce que j’ai observé, calculatrice à la main, à toutes les élections municipales depuis 1986. Mais cet écart est encore plus marqué cette année, plus de 5.5% malgré le tapage autour du déménagement du casino. Il est probable que nombre de bulletins annulés ou simplement un refus d’aller voter de plusieurs personnes sont parmi les facteurs ayant accentué ce phénomène même s’il n’y a pas eu de campagne en ce sens comme nous le disions plus tôt.

À l’évidence, il semble qu’il y a eu des gens qui ont boudé les urnes comme moyen de protestation et ce même si la candidate de Projet Montréal (seul parti qui s’est opposé au casino) dans le district de Pointe St-Charles a amassé plus 18% du vote (8% de plus que la moyenne de son parti) sans véritablement faire de campagne. Pourtant Jacqueline Montpetit avait potentiellement tous les atouts pour gagner assez facilement (commissaire scolaire pendant 10 ans pour les 3 quartiers plus hauts mentionnés et mairesse durant les 4 dernières années). Il faut donc considérer que ses tergiversations et ses louvoiements lui ont fait perdre, malgré sa victoire à l’arrachée, une partie de son capital politique accumulée principalement au sein de la mouvance communautaire.

Sans négliger le discrédit manifeste dont jouissent les politicienNEs (taux de 15% de confiance au dernier sondage de l’automne 2005) et le système politique (il y a évidemment un lien à faire entre les deux), le faible taux de participation est souvent un indice d’absence de débat politique dans une campagne. Imaginez, à l’échelle de Montréal on s’est afronté sur la question des nids de poule. Malgré des enjeux importants dans le Sud-Ouest tel la sécurité, la pauvreté, et surtout le déménagement casino, les 8 candidatEs des 2 principaux partis ont préféré éviter ces questions litigieuses. D’autre part, et c’est une constatation, la faible capacité des organisations sociales et des citoyens-nes de « forcer », par toutes sortes de moyens, le débat sur la place publique sur ces enjeux majeurs représente l’autre facette des campagnes électorales ternes. Les 2 assemblées électorales publiques dans Pointe St-Charles et la Petite-Bourgogne organisées par le milieu communautaire, n’ont pas été suivies par des actions conséquentes. Ces assemblées jouent alors un rôle mitigé dans le débat politique.

Mais au-delà de cette victoire de l’équipe Bourque, 3 éluEs sur 5, la campagne nous a démontré que le leadership politique (les éluEs des 2 partis confondus) sera aussi faible que durant les 4 dernières années dans le Sud-Ouest. Les 2 politiciennes réélues pour un second mandat, Line Hamel et Jacqueline Montpetit, n’ont pas montré beaucoup d’envergure et surtout elles n’ont pu défendre les intérêts majoritaires de la population sur les enjeux majeurs qui nous affectent. Réalistement, il faut continuer à s’attendre à un penchant encore plus favorable à des politiques pro-développeur, pro-condo et en faveur des puissants intérêts financiers et politiques qui se pointent le nez dans le Sud-Ouest et plus particulièrement dans Pointe Saint-Charles. En revanche, nous aurons droit encore à l’étalement de leurs états d’âme sur les problèmes sociaux et de pauvreté qui touche une bonne partie des quartiers du Sud-Ouest. Mais cela n’aide pas à l’amélioration de la situation des plus mal pris.

Une nouvelle concentration du pouvoir à Montréal

Il faut considérer les résultats électoraux à l’échelle de la ville comme un renforcement de la position et de l’idéologie que met de l’avant le maire Tremblay. Celui d’un développement néo-libéral appliqué à la ville. Autant dans le plan d’urbanisme que dans le mandat accordé à la Société du Havre, la croissance est le leitmotiv fondamental de toute

sa politique économique. Sans aucune espèce de doute le maire Tremblay pourra compter sur Jacqueline Montpetit pour défendre les intérêts des puissants, à commencer par ceux que veulent nous imposer les caïds qui se trouvent au conseil d’administration de la Société du Havre et de Loto-Québec.

En y regardant de près, on voit que le maire Tremblay a considérablement renforcé son pouvoir à l’Hôtel de ville et au nouveau Conseil d’agglomération qui verra le jour en janvier prochain pour l’ensemble de l’Île de Montréal. Il s’est accaparé de l’arrondissement stratégique de Ville-Marie (centre-ville) avec son nouveau maire Benoit Labonté, ancien président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et ancien membre du conseil d’administration de la Société du Havre qu’il a dû quitter pour se présenter aux élections. La Société du Havre propose justement d’étendre le Centre-ville en grugeant sur le quartier Pointe St-Charles. Benoit Labonté sera responsable de la Culture et du Centre-ville. D’autre part, le maire Tremblay détient un vote prépondérant à la CMM (communauté métropolitaine de Montréal) qui chapeaute 63 municipalités et 3.4 millions de personnes. Ce pouvoir montréalais, dit décentralisé lorsqu’on le regarde par la lorgnette de l’arrondissement, est pourtant devenu le « terrain de jeu » des élites politiques et économiques montréalaises, ce qu’il annonçait malgré l’analyse des experts qu’on a vu défilé dans les médias depuis 5 ans. Suite aux processus de fusion forcé (PQ) des municipalités et en dépit de quelques défusions éparses (Libéraux), le processus qui est en phase de s’achever est une centralisation accrue du pouvoir politique mais surtout économique à Montréal. Je n’ai pas lu une seule analyse de gauche sur le phénomène que l’on a vécu sauf sur la prétendue redistribution de la richesse que l’on attendait. Faut-il croire que la gauche à Montréal est particulièrement favorable au pouvoir centralisé de l’économique et du politique ?

D’un strict point de vue parlementaire, Pierre Bourque, qui continuera pour quelque temps à être chef de l’opposition, a joué, tout au long des 4 dernières années à l’Hôtel de ville, un rôle qui a laissé toute la marge de manœuvre à l’équipe Tremblay. Comme il est au même diapason que le Maire actuel sur les orientations économiques, le point de vue néo-libéral dominera toute la politique à l’Hôtel de ville. Pierre Bourque ne diverge de Tremblay que sur la manière de gérer. Et ce n’est pas les très rares « soi-disant conseiller-ières progressistes » qui empêcheront le Maire de dormir pour les 4 prochaines années. C’est donc, il faut tout de même le déplorer, dans un contexte bétonné de démocratie représentative traditionnelle que les timides tentatives de faire avancer le concept de démocratie participative auront à évoluer. Sans pression populaire de rue importante, il faudra faire son deuil des possibilités de transformation significative de l’influence des forces sociales sur la politique municipale.

Des nominations stratégiques
Donc, en plus de nommer Benoit Labonté au comité exécutif de la Ville, le maire Tremblay a désigné le nouveau maire de l’arrondissement Rosemont-Petite-Patrie comme responsable du transport et de l’aménagement urbain au sein du comité exécutif. L’aménagement urbain c’est justement notre grande préoccupation pour les années à venir dans le quartier Pointe Saint-Charles. Le grand avantage de Tremblay avec cette nomination, c’est qu’André Lavallée connaît très bien les questions d’aménagement et les enjeux urbains. André Lavallée a présidé du temps de l’Administration Doré à la mise en place du premier plan d’urbanisme à Montréal en 1992. D’autre part, il connaît assez bien l’état d’organisation et de mobilisation de la faune militante communautaire du quartier y ayant œuvré quelques années, dont tout récemment au sein du GRT Bâtir son Quartier situé dans la Pointe. Il a donc ses « entrées directes » dans le milieu. CertainEs diront qu’il s’agit d’un plus. Gageons qu’au total qu’il s’agit d’un moins pour la dynamique autonome du milieu communautaire. André Lavallée demeure un politicien.

Enfin, une autre nomination importante au comité exécutif est celle d’Alan DeSousa, maire de l’arrondissement St-Laurent. En plus d’être responsable du développement durable, poste qu’il a occupé de 2001 à 2005, il se voit ajouter le mandat de réaliser le programme du Maire, « Imaginer – Réaliser Montréal 2025 », ce chef d’œuvre, il faut l’avouer, d’un néo-libéralisme enrobé du concept de développement durable.

Les impacts de l’élection à Pointe Saint-Charles
Mais soyons bons joueurs. Il est effectivement vrai également qu’une certaine décentralisation a vu le jour dans les arrondissements de l’ancienne ville de Montréal. Ce n’est pas peu dire. L’arrondissement une forme de pouvoir institutionnel réel. Et il y a matière à s’y intéresser très sérieusement. Ne serais-ce que sur 3 aspects, celui du fonctionnement démocratique, celui des services publics et celui de l’aménagement urbain. Et l’aménagement urbain est précisément sur la sellette de ce temps-ci avec les visées de la Société du Havre d’étendre le centre-ville vers le sud et d’amputer une partie de l’arrondissement du Sud-Ouest et du quartier Pointe Saint-Charles avec son méga-projet de développement urbain (8 à 10 milliards$ prévu d’ici 2025). Tôt ou tard mais plus tôt que tard de voraces promoteurs privés précéderons ou suivrons la manne des intentions et des investissements publics urbains.

Comme nous le disions plus tôt, une partie significative de l’élite politique et économique est massivement derrière le complexe de divertissement et du déménagement du casino. Dans le Sud-ouest c’est aussi la même chose. En effet, tous les éluEs locaux des 2 partis Vision Montréal et l’UCIM qui ont été éluEs ont jusqu’ici refusé de se prononcer. Mais Gérald Tremblay a annoncé durant la campagne qu’il jouerait le rôle de porte flambeau en faveur de complexe de divertissement. Quant à Pierre Bourque, chef de l’opposition officielle, il a pris position lui aussi en faveur. On imagine mal les éluEs locaux s’opposer à leurs chefs. Et comme ils n’ont rien dit durant la campagne, un grand nombre de personnes croient en effet qu’ils appuient et appuieront le déménagement du casino et le complexe de divertissement. D’autre part, la Chambre de commerce et d’industrie du Sud-Ouest fait partie de la Coalition
de gens d’affaires qui fait campagne en faveur du déménagement du casino. Enfin, la Corporation de développement locale pour le Sud-Ouest le RESO, a adopté depuis le début une position attentiste et mitigée sur toute cette question.

Seul le parti Projet Montréal s’est fermement opposé au déménagement du casino. Son chef Richard Bergeron sera seul de son camp à l’Hôtel de ville pour défendre, nous l’espérons, une autre vision du développement. Y aura toujours moyen de l’alimenter pour apporter le sujet sur le plancher de l’Hôtel de ville si ce dernier se montre intéressé. Mais, il ne faut surtout pas surestimer l’impact parlementaire d’un discours plus progressiste, ce que nous avons tendance à faire.

Ainsi, nous nous retrouvons avec la situation suivante au lendemain de l’élection du 6 novembre. Le comité CN/casino de la Table Action-Gardien exerce un leadership incontestable contre le déménagement du casino et tente d’étendre la lutte à une échelle plus large que le quartier tout en voyant poindre les enjeux que posent tout le développement de la Société du Havre sur l’avenir même du quartier. D’autre part, le comité Opération populaire d’aménagement (OPA) de la Table entreprend un processus sur ses priorités d’aménagement qui devrait logiquement mener à l’instauration d’un rapport de force politique avec l’arrondissement afin d’établir des mécanismes de discussion sur les priorités pour Pointe Saint-Charles.

La confrontation semble inévitable
Dans les 2 processus le mouvement social se trouve face à un pouvoir local qui a refusé toute percée des groupes sociaux dans le fonctionnement démocratique des enjeux urbains. La confrontation semble inévitable avec la mairesse de l’arrondissement. Une telle situation politique tout à fait exceptionnelle (le maintien du statu quo du fonctionnement démocratique de l’arrondissement) demandera une réponse politique exceptionnelle. En effet, pour ce qui est de l’OPA, ses représentantEs ont déposé en juin dernier un cahier de revendications en indiquant entre autre que l’OPA voulait instaurer un mécanisme permanent de discussion entre l’arrondissement et le quartier pour faire avancer ce que la centaine de citoyenNEs participantEs y ont inscrits. Mais depuis ce temps aucune réaction ou réponse n’est venu de l’arrondissement. Cependant, lors de l’assemblée publique électorale du 27 septembre dernier, Jacqueline Montpetit s’est avancée quelque peu en faveur d’un mécanisme sans pour autant préciser quoi que ce soit. Il faudra vérifier s’il s’agissait d’une réelle ouverture. Mais tout le travail reste à faire. En effet, l’organisation du rapport de force face à l’arrondissement n’a jamais été jusqu’ici une préoccupation réelle et organisée de la Table Action-Gardien. Cependant cette prochaine étape apparaît incontournable d’ici juin prochain si le mouvement communautaire de Pointe Saint-Charles veut augmenter et enraciner son leadership politique dans le quartier.

En ce qui concerne le dossier casino, la situation est plus claire. L’arrondissement (c’est-à-dire les éluEs) a laissé passé l’occasion d’être un interlocuteur de premier plan. L’attitude la mairesse Jacqueline Montpetit y est pour beaucoup. Suite à l’élection, l’arrondissement risque d’être évincé comme acteur politique significatif. Le dossier aura tendance, comme on le constate dans les médias, à se transposer vers la ville centre. C’est véritablement l’Hôtel de ville qui tiendra le flambeau de la réalisation du centre de divertissement comme l’a annoncé Gérald Tremblay voilà quelques semaines. Jacqueline Montpetit, dépassée par l’ampleur des questions soulevées, en sera certes soulagée. Elle pourra joué le rôle de relais de l’hôtel de ville dans l’arrondissement. Et les membres du comité exécutif, DeSousa, Lavallée et Labonté, y joueront sans doute un rôle déterminant dans leurs champs respectifs. Mais cela n’empêche pas pour autant d’envisager des actions à l’arrondissement en terme de stratégie locale pour :
 faire pression sur la Ville
 Pour renforcer les positions du quartier face à l’arrondissement
 Faire de l’éducation à l’implication politique des groupes sociaux et de citoyenNEs dans les dossiers aménagement.

En somme, les dernières élections municipales comme on pouvait s’y attendre, n’ont pas modifié la trame de fond des enjeux politiques. La faiblesse politique de l’arrondissement Sus-ouest et un renforcement de la concentration du pouvoir politique à l’hôtel de ville en lien étroit avec les développeurs montréalais annonce de difficiles batailles politiques.

Le rôle des libertaires dans un environnement politique et économique agressif
Comme nous le disions plus tôt, Pointe Saint-Charles fera face à un pouvoir politique qui a renforcé largement son emprise sur la Ville et qui s’est donné comme mission d’accélérer la croissance économique en lien particulièrement étroit avec la bourgeoisie économique montréalaise. Ce pouvoir a théoriquement les coudées franches pour imposer sa vision. Plus que jamais face au méga-projet de la Société du Havre, Pointe Saint-Charles et le mouvement communautaire apparaît comme le village gaulois face à l’attitude et aux ambitions urbaines de quelques unEs.

L’enjeu du déménagement du casino sera dans le portrait pour au moins 6 mois à partir de maintenant. Et cette bataille est loin d’être gagnée. Il faut nous le répéter. C’est le maillon faible de la stratégie d’une partie significative de la bourgeoisie économique de Montréal et empêcher le déménagement du casino dans les conditions actuelles serait une victoire tout à fait extraordinaire et nous pouvons raisonnablement penser pouvoir la gagner à l’heure actuelle.

Mais en même temps, gagner la bataille du casino, si c’est gagner du temps et du prestige social et politique comme mouvement social, ce n’est pas gagner la lutte pour la survie d’un quartier populaire. Cette lutte sur le long terme qui devient quasi permanente, sera possible si les gens actuels peuvent y rester, s’il s’y développe suffisamment de forces vives chez les citoyenNEs pour s’approprier les transformations inévitables du paysage urbain et si une culture politique autonome de quartier, en somme les valeurs libertaires, y prend racine.

Voici donc la contribution que nous essaierons d’y apporter.

 Comme nous avons essayé de le faire depuis un an, renforcer la capacité de la Table Action-Gardien à intervenir et à augmenter son leadership politique dans le quartier Pointe Saint-Charles a connu un certain succès. Autant par l’OPA que par la lutte contre le déménagement du casino, nous pouvons apporter notre contribution et jouer un rôle de sensibilisation et d’éducation à l’action politique. Nous l’avons fait lorsque nous avons publié la première analyse d’impact du casino au printemps dernier et en nous lançant dans la première récolte de pétition au métro Charlevoix. Aujourd’hui, nous voyons bien que cela a porté des fruits sur le renforcement du mouvement anti-casino au sein de la Table et dans la population et surtout d’amener de plus en plus de gens « à croire » que cela est possible de gagner par la mobilisation et par le développement d’une pensée et d’une action autonome.

 Lutter contre, c’est une première affirmation du geste politique. Mais ce n’est pas suffisant pour enclencher une démarche d’appropriation individuelle et collective. Il faut montrer que le quartier est capable de produire des visions urbaines. Quoi de mieux alors que d’afficher sur la place publique et de débattre d’idées qui visent à combattre et à dépasser les visions aliénantes de l’urbain elles-mêmes basées sur le prestige, le tourisme d’affaires et la concurrence internationale.

Alors, il faut donner à la population et nous donner l’espace pour rêver notre quartier. Et pourquoi pas le rêver avec une approche fondamentalement écologique, anti-gaspillage et axée sur des rapports humains qui favorisent la prise en charge collective et individuelle du milieu de vie.

 Une bonne partie du pouvoir politique et économique passe par une mainmise sur le système médiatique. Bien sûr, il importe « d’utiliser au maximum » le « main stream médiatique », surtout qu’en ce moment la bataille du casino nous apporte une sympathie avouée de la part de certainEs journalistes, sympathie que nous sommes peu habituée à goûter. Mais, lorsque le discours se transposera sur les enjeux d’aménagement urbain, comme il est inévitable que cela se produise, la sympathie des médias risque de se ternir abruptement. Les médias ne sont pas neutres et il est inutile de brailler la dessus lorsque l’on reverra les éditorialistes défendre les idées dominantes et que nos opinions et lettres aux lecteurs seront tassées dans le coin ou simplement ignorées.

Alors, nous serons forcés de revenir à une donnée fondamentale de base. Dans toute bataille pour l’autonomie de fonctionnement il faut contrôler un minimum de discours par nos propres moyens. Il faut donc maximiser nos capacités d’intervention autonome et en ce sens mettre des efforts pour améliorer considérablement l’utilisation du site internet et de d’autres moyens artisanaux de communications.

Malgré certains efforts déployés (journal, graffitis, site internet) les libertaires n’ont pas montré jusqu’ici qu’ils-elles sont en mesure de jouer un tel rôle déterminant dans Pointe Saint-Charles et dans le Sud-Ouest sur l’émergence d’un discours et d’une parole autonome.

Enfin, l’action directe, symbolique ou non, est aussi une forme de discours visuel qui doit faire partie de notre baluchon de moyens.

La situation urbaine actuelle autour du quartier Pointe Saint-Charles représente une occasion exceptionnelle de renforcer à la fois nos idées et notre compréhension des enjeux de société et participer directement à la mise en place d’éléments d’une société anarchiste. À nous de détecter la meilleure utilisation de nos trop minces énergies.