La lutte continue dans Pointe Saint-Charles pour sauver le bureau de poste.

par Pascal Lebrun pour l'Agence de presse libre de Pointe Saint-Charles.

C'est par une froideur inhabituelle que s'est tenue ce jeudi 13 décembre une nouvelle manifestation (dont nous voyons l'arrivée sur la photo) pour sauver le seul bureau de poste de Pointe Saint-Charles. En effet, la lutte continue après le dépot à la Chambre des communes d'une pétition de plus de 1000 noms contre la fermeture plus ou moins déguisée en déménagement du centre de service de Poste Canada.

Le rassemblement a débuté par les discours d'intervenant-es du quartier qui taillaient en pièces l'argumentaire qu'avance la société d'État pour légitimer son choix. Les gens se sont ensuite déplacés vers le bureau de poste où d'autres personnes ont encore pris la parole, dont un représentant du syndicats des travailleuses et travailleurs des postes, toujours à l'appui de la population dans ce dossier. Le député Thierry St-Cyr n'était cette fois pas présent en personne, car il était à Ottawa au même moment pour déposer la pétition dont il a été question plus haut. Un représentant a toutefois lu une déclaration d'appui.

Une décision d'affaire?

En gros, Poste Canada prétend avoir pris une décision d'"affaire" en déménageant un bureau de poste trop peu achalandé d'un espace trop grand et trop cher. Les représentants de la société affirment aussi que le nouveau bureau de poste sera encore très accessible et à l'intérieur du quartier et que de toutes façons, il existe plusieurs autres points de service à proximité. Qu'est-ce qui cloche?

Plusieurs éléments nous échauffent les oreilles là-dedans, en commençant par le fait qu'une société publique "prend une décision d'affaire" au détriment d'une population. En effet, la raison d'être d'une société publique est d'offrir un service à la population. On comprend qu'elle puisse s'autofinancer et vouloir éviter les déficits, mais ce n'est pas ce genre de logique qui est à l'oeuvre ici. L'année dernière, les surplus de Poste Canada se sont élevés à plus de 200 millions de dollars. La société d'État est donc loin d'être en faillite. Pourtant, on veut encore augmenter ces surplus en privant les gens du quartier de leur bureau de poste.


Ce n'est pas une logique de société publique, c'est une logique de maximisation de profit, tout ce qu'il y a de plus capitaliste. L'État fédéral veut agir et réfléchir en entreprise privée ultra libérale? Soit. Je ne crois pas non plus en l'État providence. Mais je demande alors à ce que l'on me rembourse la moindre cenne d'impôt ou de taxe que j'aie pu payer qui a servi à la société d'État. Parce qu'on ne paye pas de taxes à une entreprise privée et qu'à vouloir jouer les deux rôles, Poste Canada risque de se retrouver le derrière par terre entre les deux chaises...

De toutes façons, cette logique a quelque chose d'autre. Simplement, le bureau de poste n'est pas "trop peu achalandé". Plusieurs personnes et entreprises du quartier dépendent de lui. Aussi, bien que ce soit encore vrai pour l'instant que l'espace payé est trop vaste pour ses besoins, l'Office municipal d'habitation (OMH), qui est propriétaire du bâtiment, a déjà offert de retrancher la partie en trop et de renégocier le bail en fonction du nouvel espace. En plus, le nouvel emplacement est carrément désert, ce qui ne risque certainement pas d'améliorer l'achalandage... La question de rentabilité n'est donc pas la cause réelle de cette fermeture. Selon le représentant du syndicat qui est venu nous parler, Poste Canada ferme des bureaux de poste un peu partout pour sous-traiter ses services dans des commerces privés, comme des pharmacies. Pas parce que c'est moins cher ou plus efficace, mais bien simplement pour graisser la patte des amis des partis au pouvoir à ce moment-là, des amis comme Jean Coutu... Et encore une fois, ce sont les gens qui font les frais de ces gamiques de riches.

Finalement, en plus de nous arnaquer, on nous rit carrément en pleine face en nous disant que le nouveau bureau de poste sera près des gens et à l'intérieur du quartier. Il y a deux ans, Loto-Québec qui prévoyait placer son casino deux fois plus près affirmait qu'il serait, lui, loin des gens et hors du quartier... Hé oui, on le savait déjà, mais encore, les dirigeants économiques et politiques arrangent le portrait à leur avantage. "Près", "loin", qu'est-ce que ça veut dire dans la bouche d'un haut-fonctionnaire ou d'un politicien quand ces gens sont incapables de respecter un engagement chiffré? On nous prend pour des épais...

En plus, Poste Canada a répliqué publiquement après les premières protestations que plusieurs autres points de services se trouvaient à "proximité" du quartier, soit à moins de trois kilomètres, dont un sur l'Île des soeurs et un autre à Westmount... D'abord, trois kilomètres à pieds, ça fait pas mal long pour acheter un mandat poste (il n'y a pas beaucoup d'autobus à Westmount). En plus, Westmount ou l'Île des soeurs, c'est vraiment encore plus loin de Pointe Saint-Charles sur le plan social. Il faut regarder la réalité en face: les gens du quartier ne pourront tout simplement pas avoir accès comme ça aux services du bureau de poste de Westmount. Les choses ne se font pas comme ça. Les différences socio-économiques jouent encore un rôle très lourd dans ce genre de choses...

Comment pourrait-on résumer la chose, donc? Je dirais bien simplement que les maîtres vont encore essayer de nous faire manger une pelleté de marde en nous faisant accroire que c'est du miel... Mais bon, il est encore temps de leur montrer de quel bois on se chauffe! Montrons-leur qu'on ne peut pas facilement nous arnaquer. Il semblerait que l'histoire du casino commence déjà à s'estomper dans certains esprits; rafraichissons-leur la mémoire!

::: Actions possibles :::

- Téléphoner au Service à la clientèle de Postes Canada au 1-800-267-1177
- Faire une plainte au Bureau de l’ombudsman au 1-800-204-4198
- Et bien d'autres...