Stéphanie "728" Trudeau; la brutalité et la déontologie policières sous l'omerta

L'un des mauvais souvenirs de la grève étudiante est revenu nous hanter cette semaine. L'infâme constable Stéphanie "728" Trudeau en a en effet remis plein les médias à cause de sa brutalité et sa haine du mouvement étudiant. Pour ceux et celles qui ne l'auraient pas déjà vu, vous pourrez voir la vidéo qui l'a rendue célèbre en mai dernier ici. Pour un résumé de ses plus récentes frasques, voir cet article sur le site de Radio-Canada.

Outre le comportement scandaleux au point d'en friser le spectaculaire, la nouvelle bavure soulève plusieurs questions, dont certaines sont posées dans cet autre article de Radio-Canada. La plus importante, portant sur la nature et la fonction réelle de la police dans notre société, est pourtant à peine abordée par le média de masse.

Parce qu'on peut légitimement se demander quel rôle les policiers voient pour l'institution qu'ils servent. Le directeur du SPVM, Marc Parent, s'est excusé aujourd'hui, soutenant que les propos de "728" ne reflétaient pas les valeurs de l'institution. Bullshit. Si c'était le cas, des policiers n'auraient pas crevé l'oeil d'un jeune dont le "crime" se résumait à s'être assis devant un édifice public pour manifester son désaccord avec la hausse des frais de scolarité. Dans le pire des cas, le geste n'aurait pas été justifié par la suite. Il n'y aurait pas eu autant de "Din fesses mon côlisse!" sur youtube sans que le SPVM ne se livre à un examen de conscience. Mais non, rien. Dans les faits, Marc Parent s'excuse pour la seule et unique raison que "728" a été assez stupide pour se faire connaître en mai dernier en agressant des gens devant une caméra et encore une fois cette semaine en enregistrant elle-même ses propos scabreux! La plupart des policiers disposent de plus de jugeote que ça...

La plupart du temps, les bavures des policiers sont entérinées par leur hiérarchie. Comme l'indique le criminologue Marc Alain dans l'article cité plus haut, le problème n'est pas individuel, mais systémique. L'absence de règles claires à l'interne engendre tout un jeu de coulisse avec la hiérarchie et la fraternité quant aux sanctions à apporter vis-à-vis de tel ou tel comportement fautif.

Cependant, les policiers, comme individus, portent en partie la responsabilité de cet état de fait. Si ses collègues avaient été dérangé.e.s par son agression contre des manifestant.e.s au mois de mai dernier, pourquoi ne pas être intervenu? Pourquoi ne pas avoir dénoncé le geste après coup? Le silence tacite des policiers envers les fautes de leurs collègues a déjà souvent été comparé à une omerta. Qui plus est, la fraternité se bat bec et ongles pour limiter le contrôle sur le travail policier. Encore cette semaine, Yves Francoeur, le président de la Fraternité des policiers et policières de Montréal, demandait à ce que le contrôle politique sur le budget et les orientations du SPVM soit relâché, sous prétexte du manque total de crédibilité et de légitimité de l'administration Tremblay. Prétexte seulement, parce que sinon, il aurait dû dénoncer aussi le manque de crédibilité du SPVM, qui avait en douce donné la responsabilité de la sécurité de son quartier général à la mafia. Pour vrai, à la mafia... Et pourtant non, tout baigne.

Alors? Quand on sait à quel point la protection offerte par le commissaire à la déontologie policière du Québec est de la bouette, on est en droit de se poser de sérieuses questions. D'ailleurs, toujours selon le criminologue, avec la grève étudiante fraîche en mémoire, la police pourrait bien faire face à une crise de confiance de la part de la population. Il ne croit pas si bien dire.

Et pour complémenter la réflexion voir l'excellent texte de Francis Dupuis-Déry dans le DFevoir du 13 octobre 2012

Par Pascal Lebrun
Pour l'Agence de presse libre de Pointe-Saint-Charles