Enquête sur l'impunité: Ils n'oseront pas

Par Marcel Sévigny - 22 mars 2013

Une vigile se tient régulièrement tous les mardis devant le bureau de la première ministre Marois pour réclamer une enquête publique sur les agissements de la police durant la grande grève étudiante de 2012. (Photo de Jacques Nadeau)

Plus de 3 400 arrestations ont été effectuées, au moins une dizaine de blessés graves, un record de tous les temps. L'arbitraire policier y régnait en maître. Il a montré son vrai visage. À part Amir Khadir (l'exception qui confirme la règle), quel député a émis des critiques sur les agissements de la police?

Plus de 60 organisations de la "société civile" exigent, avec raison, la fin de l'impunité de la police par rapport à la violence qu'elle exerce spécialement lors des manifestations, mais également lors d'interventions "routinières" dont certaines menant à des bavures causant la mort.

le Vendredi 15 mars dernier, la 17e manifestation annuelle contre la brutalité policière a été déclarée illégale avant même qu'elle ne débute. Durant les jours précédents, le marketing policier, fidèlement reproduit par les médias de masse comme par les années passées, a encore une fois montré que c'est la police qui détermine où commence et où s'arrête la liberté de manifester. Au total, 298 personnes ont été interpellées ou arrêtées.

Quatre jours plus tard, c'était le tour de 34 manifestantEs supplémentaires qui étaient interpellées par la police qui n'hésite pas à vouloir "casser" le droit de manifester et en particulier pour ceux et celles qui refusent de collaborer (lire se soumettre à l'arbitraire) avec la police.

La violence qu'on tente de légitimer en accusant l'autre

Les politicienNEs refusent de critiquer les actions de la police. Au contraire, les responsables politiques en rajoutent et reçoivent l'appui de leurs collègues. Pourquoi ? Ils et elles ont simplement peur. La police (et l'armée) sont les derniers remparts de notre société "dite démocratique". Tous ces éluEs n'ont qu'une chose en tête comme résultat: propager cette peur chez une partie significative de la population afin de recevoir leur appui et que l'agitation cesse.

«Avoir peur de la police, au Québec, à Montréal, ça n’a pas de bon sens». C'est le titre d'un article de Marie-Andrée Chouinard du journal Le Devoir du 20 mars dernier. Cette opinion reflète au moins une chose. Combien de gens sont tombés des nues après avoir vu les actions de la police lors du printemps érable, croyant sans doute que les exactions de la police contre des manifestantEs paisibles appartenait à un autre type de société. Pourtant, partout dans le monde la police a le même rôle fondamental, la répression.

De plus en plus de personnes constatent depuis ce printemps érable que le masque de vernis démocratique commence à se fendiller. Il est temps. Pourquoi ? Parce que ceux et celles (largement minoritaires actuellement) qui aspirent à des changements profonds de la société, savent qu'ils et elles ne pourront pas éviter la volonté de ceux qui détiennent et qui voudront garder leurs pouvoirs et leurs privilèges sur la société. Cette volonté des pouvoirs dominants se traduira, comme elle se traduit actuellement par une utilisation accrue de la répression et de la violence étatique. Vaut peut-être mieux en avoir conscience le plus tôt possible et surtout agir en conséquence en commençant à ne pas collaborer avec les forces du désordre. Et plus nous serons nombreux et nombreuses à le faire plus nous pourrons résister efficacement.

Lorsque l'État et autre pouvoir institutionnel ne sont plus en mesure de convaincre "démocratiquement" des pans de la société que ses décisions méritent d'être respectées, alors ils se tournent vers la répression. Répression par les lois et les règlements, la crise étudiante a été exemplaire de répressions à cet égard.

L'enjeu de l'impunité

Un corps répressif qui ne jouit plus de l'impunité devient un outil inefficace pour répandre la peur. En revanche, les autorités vont sanctionner les cas extrêmes (matricule 728), mais c'est bien parce qu'elle fût filmée, 2 fois plutôt qu'une. Alors, ont en fait des boucs émissaires, afin que le système puisse continuer à sévir avec la plus grande liberté possible.

Si les forces de l'ordre (du désordre dirions-nous) ne sont plus capables de contrôler la colère légitime des citoyenNEs qui risquent de perturber le fonctionnement marchandisé de la société, alors où allons-nous se demandent les politiciensNEs? Voilà pourquoi la vaste majorité des éluEs n'osent même pas remettre en question la violence policière.

La bataille de l'impunité est donc un enjeu stratégique du combat actuel et les éluEs le savent. Voilà pourquoi ils et elles n'oseront pas déclencher une véritable enquête publique... à moins qu'ils et elles ne soient "forcés de le faire".

À nous de jouer!