350, rue Bourgeoys, Pointe Saint-Charles
1ier mars 2006
Café Paradoxe, 255 Ash
Compte-rendu et commentaires:
Par Marcel Sévigny
Un contexte où les promoteurs privés continuent à déterminer l’aménagement de notre quartier
En toile de fond :
• Le 7 février 2006, un projet de construction d’habitation était inscrit à l’ordre du jour du conseil d’arrondissement (1ière lecture adopté par les éluEs du Sud-Ouest). Compte tenu que l’adoption de ce projet implique un changement de zonage, une consultation était prévue pour le 1ier mars suivant.
• Seule la mairesse de l’arrondissement était absente de la réunion sur les 5 éluEs du Sud-Ouest
• M. Villeneuve et Mme Shoiry étaient les fonctionnaires qui répondaient aux questions
• Lorsqu’on regarde sur le site internet de l’agent immobilier du Groupe Sutton-Clodem, on nous présente le projet comme s’il s’agissait de 24 maisons unifamiliales de 4 chambres à coucher, détaillées au prix de 324 750$. La moyenne des prix indiqués pour les 66 logements est de 180 000$ l’unité. Selon les critères sur le marché il faut un revenu familial d’au-delà de 60 000$ par année pour acheter, revenus qui correspondent au double de la moyenne actuelle du revenu familial dans Pointe Saint-Charles.
• Lorsqu’on lit le document de l’arrondissement, on indique qu’il s’agit de 44 unités de logement de divers types de une à trois chambres à coucher.
• Lorsque les fonctionnaires nous ont présenté le projet le soir du 1ier mars c’était dans les faits 66 logements qui étaient proposés. Selon le fonctionnaire, le nombre de 66 logements, (incluant une quarantaine d’espaces de stationnements) est un maximum permis et il peut y avoir un autre chiffre plus bas. De toute façon cela induit les citoyens-nes en erreur.
• Le type de consultation organisé par l’arrondissement se fait en un seul moment, c’est-à-dire, il y a une présentation du projet par les fonctionnaires, ensuite il y une pause qui permet aux gens de s’inscrire s’ils veulent faire des commentaires. En faits, les questions d’éclaircissement, les commentaires ou les propositions d’amendement au projet qu’on peut faire sont prévues dans le même espace de temps. En principe on a droit à un seul commentaire ou à une seule question, mais dans les faits la conseillère Line Hamel a fait preuve de souplesse (plusieurs commentaires et quelques questions de ma part) et j’ai pu revenir une deuxième fois.
• Le 7 mars au conseil d’arrondissement les éluEs l’adopteront en 2ième lecture (il n’y a eu aucune protestation contre l’implantation comme telle. C’est par après, que les fonctionnaires discuteront avec le promoteurs pour qu’il apporte des modifications (on ne sait évidemment pas quelles recommandations ils feront au promoteur). Un avis public sera publié dans un journal le 12 mars en regard de la possibilité d’un référendum (12 signatures par secteur : je ne connais pas la limite du ou des secteurs) pour ceux et celles qui voudraient bloquer le projet.
• Le projet présenté a été vu par le comité consultatif en urbanisme (CCU). On se demande qu’elles sont les questions pertinentes que ce comité à pu soulever ?
• Il y avait environ 20 personnes présentes, dont 3 membres du comité de mobilisation du comité CN-Casino et dont une majorité d’anglophones. Une dizaine se sont inscritEs à la période de question.
• Les éléments le plus souvent apportés (j’y reviens plus loin):
o Stationnement, circulation et aménagement
o Intégration architecturale au quartier
o Densité de la population
o Type de logement
o Pollution des terrains
o Autres : moratoire sur condo, est-ce avantageux pour le quartier, espaces verts,
Éléments de conjoncture :
• Ce projet d’habitation assez important est prévu sur un terrain vacant situé au sud de la rue Leber, entre les rues Ste-Madeleine et Bourgeoys. En fait il s’agit d’un terrain immédiatement adjacent aux terrains du CN, donc, dans la zone « sensible » revendiquée par la Table Action-Gardien en vue d’une prolongation du quartier vers le sud, sud-est.
• Selon le fonctionnaire le terrain serait moyennement pollué. La procédure de décontamination et surtout celle des résultats des tests restent en fait non accessible. Cette procédure est sous le contrôle du ministère de l’environnement à Québec et le concept de gestion du risque est utilisé. Le promoteur doit faire des travaux de décontamination et soumettre le tout à Québec. On peut avoir accès aux résultats seulement si promoteur le permet. Habituellement les promoteurs refusent de rendre public les résultats. Quant a l’arrondissement et à la ville ils engagent un professionnel pour évaluer mais nous ne savons pas sur quelle base, s’il y a des test et nous ne savons pas si on peut avoir accès aux résultats.
o C’est l’architecte Jacques Massen qui est sur le dossier. Il est à l’occasion promoteur et est très actif dans le Sud-Ouest.. Il est un de ceux à qui la Redpath a été vendu par le régime Bourque en 1998 à des amis du régime (il a toujours été près du parti civique de Drapeau et par la suite de Vision Montréal). Il était aussi impliqué dans la réalisation d’une coopérative à St-Henri à la fin des années 1980 (1) qui fut réalisée sur un terrain…. pollué. La ville fut poursuivi et dû débourser 1 million$ en règlement hors cours pour dépolluer les terrains sous les maisons. Il a été impliqué dans le projet de la Shirwin William (Atwater et Centre) où on n’a jamais su si les bâtiments recyclés en habitation avaient été suffisamment décontaminés
• L’arrivée d’un tel projet à l’orée de vastes espaces désaffectés et en friche pose le problème d’une vision d’ensemble de l’aménagement urbain du secteur. En soi un projet de 66 logements semble être une continuation de la trame résidentielle qui empiète sur la trame industrielle. Juste au nord de ce projet, il y a actuellement un bâtiment industriel à vendre. Il apparaît alors logique que celui-ci sera éventuellement démoli et que des habitations y seront proposés dans un futur pas très lointain. Ainsi, comme l’a souligné une résidente est-ce qu’on entrevoit des espaces verts autour ? En fait, la démarche du comité CN-Casino de la Table Action-Gardien prend toute son importance et toute son urgence. Le lancement de projets alternatifs envisagés par des groupes libertaires prend aussi toute son importance compte tenu du projet d’habitation traditionnel présenté mercredi dernier.
• La rencontre de mercredi a été très instructive ne serais-ce que par les préoccupations des citoyens-nes qui tirent dans tous les sens.
o Certaines personnes croient qu’il devrait y avoir plus de places de stationnements intégrés au projet parce que « l’arrivée de banlieusards » avec leurs 2 autos par ménage va encombrer la rue.
o Certaines autres personnes pensent qu’il faut réduire l’espace des stationnements justement pour ne pas inciter les ménages à avoir 2 voitures
En conclusion, c’est la poule et l’œuf si on n’améliore pas rapidement la qualité du transport en commun. Le transport en commun devient donc un enjeu à court terme si on veut éviter un split entre les tenants de l’automobile et les autres qui souhaitent la réduction. Sur cette question les éluEs semblent être complètement dépasséEs.
• C’est la même chose pour la densité de la population qui sera en augmentation par rapport à la situation environnante. Cela touche aux questions d’aménagement du territoire.
o Certaines personnes ont peur de voir les tensions sociales augmenter. C’est pour une telle raison qu’une personne a suggérée l’intégration de parcs comme élément pouvant favoriser le maintien d’une densité acceptable tout en évitant d’être entassé.
Conclusion : la encore on voit que les éluEs ne sont pas préoccupés par ce genre de perspectives.
• Une préférence pour une intégration architecturale (ex : la nouvelle coopérative coin Wellington et Charlevoix a été mentionnée à 2 reprises comme un modèle acceptable par rapport au projet actuel)
• J’ai été quelque peu étonné que le représentant du Regroupement information logement (RIL), groupe qui se bat pour du logement social, ne fasse pas d’intervention sur la politique d’inclusion de la Ville (10%) et de l’arrondissement (15%) (15% de logement social = 10 logements dans ce cas-ci). Personnellement, j’ai proposé que l’arrondissement inclus cette perspective. Mais dans les faits la politique d’inclusion n’est prévue que pour les projets de 200 logements ou plus. Cette situation favorisera, chez les promoteurs, l’idée de scinder des projets d’habitation pour éviter d’avoir du logement social et surtout il aura comme effet de concentrer la réalisation de logement social sur certains lieux plutôt que de les répartir à travers le quartier. La Table Action-Gardien devrait se pencher sur cette problématique rapidement.
En conclusion générale :
Ce projet renforce actuellement le vague de condo qui arrive maintenant dans le quartier Pointe Saint-Charles (voir Nordelec 1 200 log. et autres projets) sans qu’il y ait d’éléments d’intégration de la population résidente; il s’agit essentiellement d’une « vision de marché » c'est-à-dire de la recherche par le promoteur d’une clientèle en mesure d’acheter un logement ;
Le type de consultation actuellement utilisé par l’arrondissement n’est pas de nature à favoriser le débat public. Pour provoquer ce débat public il faudra que les militantEs, communautaires et autres, interviennent sur le terrain lorsque des projets se présenteront, mais cela laisse peu de marge de manœuvre en terme de temps et de disponibilités militantes ; mais il me semble clair que les citoyens-nes qui se présentent à ces consultations sont pour la plupart un peu désemparéEs sur la plupart des enjeux d’un aménagement intégré. Voilà un terreau fertile pour faire de l’information et de l’agitation sur d’autres visions d’aménagement urbain et surtout en faveur d’une vision écologique de l’aménagement.
Il faudrait ajouter systématiquement une phase supplémentaire à ce genre de consultation (une soirée d’information et une soirée de commentaires) qui pourrait être une revendication de la coordination de l’Opération populaire d’aménagement. L’objectif étant d’avoir plus de temps pour intervenir dans le milieu;
Ce type de projet, l’attitude attentiste des éluEs, leurs perspectives traditionnelles de l’aménagement urbain et le plan d’urbanisme qui ne répond pas à plusieurs enjeux, favorisent la vision des développeurs privés qui ne cherche que le meilleur moyen de vendre. Cela fait en sorte que nous ne sommes pas sur la voie qui pourrait avancer vers l’idée d’un quartier milieu de vie et plus écologique ;
Si le militantisme devait intervenir sur les priorités à soulever ce serait :
o En faveur d’une politique d’intégration systématique de logement social dans tous les nouveaux projets d’habitation (je suggère 20% ce qui permettrait de répondre, dans une perspective générale, aux besoins des gens du quartier ;
o Faire campagne pour la réduction maximum des places de stationnement automobile et faire pression pour augmenter la qualité du service public du transport en commun ;
o Intégrer les 2 éléments précédents dans une vision écologiste et libertaire, avec propositions concrètes et qui s’inséreraient dans la proposition générale d’Éco-village urbain mise de l’avant par le collectif La Pointe libertaire.
Note de bas de page
(1) Cette coopérative est un des nombreux projets d’habitation réalisés par la caisse St-Henri du directeur Robert Gagnon dans les années 1980-90. Robert Gagnon a par la suite a été responsable de l’habitation sous le régime Bourque et qui du démissionner à la suite à une enquête de la police qui n’a toutefois jamais été rendue publique. Les projets d’habitation étaient gérés par un groupe qui s’appelait JARODAN du nom de 3 personnages. JA pour Jacques Massen, RO pour Robert Gagnon et DAN pour Daniel Lalime. Jacques Massen et Robert Gagnon se sont retrouvés dans le groupe qui a acquis la Repath pour 800 000$ en 1998 et qui l’a revendu quelques mois plus tard au promoteur qui réalise actuellement des condos dont certains sont à 1½ million$