Le dossier de Michel Hamel refait surface

Agence de presse libre de la Pointe. 10 janvier 2009- Le père de la conseillère municipale de St-Henri, Line Hamel, subit présentement son enquête préliminaire au palais de justice de Montréal. M. Hamel est accusé de trafic d’influence et de tentative d’extorsion envers un propriétaire immobilier de St-Henri. Un troisième chef d’accusation (fraude) a été retiré par le juge.

M. Hamel est accusé d’avoir tenté d’extorquer 75 000$ au propriétaire d’un bâtiment à St-Henri en 2004. Le propriétaire désirait transformer l’immeuble industriel RCA Victor en condominiums. Or Mme Line Hamel, conseillère d’arrondissement depuis 2001 et présidente du comité consultatif d’urbanisme (CCU) du Sud-Ouest depuis 2002, était au courant du projet du promoteur, qui le lui avait présenté en 2003. Elle s’était alors montrée enthousiaste. Cependant, tout de suite après les trois conseillers du parti Vision Montréal (majoritaires dans le Sud-Ouest, bien que la mairie soit occupée par Mme Jacqueline Montpetit d’Union Montréal) ont commencé à se montrer réticents et à bloquer le projet.

C’est alors que le promoteur est mis en contact avec M. Hamel qui, soutient-il, lui a demandé 75 000$ pour régler le problème avec l’arrondissement et obtenir les autorisations, notamment le changement de zonage nécessaire. C’est le comité consultatif d’urbanisme qui oriente, notamment, les changements de zonage. Le promoteur, M. Jean-jacques Rousseau, a affirmé au juge cette semaine avoir enregistré ses conversations avec M. Hamel.

Mme Line Hamel était-elle au courant des activités illicites de son père? M. Hamel était le directeur de la campagne électorale de sa fille en 2001 et en 2005. Mme Hamel, en 2007, résidait à la même adresse que son père selon le journal La Presse. Cela ne présume pas de sa connaissance des activités de son paternel, mais ça suscite les interrogations…

Mme Hamel avait d’elle-même quitté le caucus de Vision Montréal après l’arrestation de son père, affirmant demeurer indépendante jusqu’à la fin des procédures judiciaires. Cependant, elle refusait de quitter toutes ses autres fonctions, notamment au CCU, malgré les apparences de conflit d’intérêt. À l’heure d’écrire ces lignes, le site Internet de Vision Montréal affiche toujours la page biographique de Mme Hamel. Elle est donc rentrée au bercail avant la fin des procédures judiciaires.

Une figure connue


M. Michel Hamel est un personnage connu du Sud-Ouest. Entrepreneur, il dirige la compagnie familiale, Albert Hamel Construction. Il est décrit comme un proche du sénateur libéral Raymond Lavigne (ancien député de Verdun). M. Hamel fut le président de l’association libérale fédérale dans le comté. M. Lavigne, qui est considéré par plusieurs comme le grand manitou libéral du Sud-Ouest, a récemment fait l’objet d’une enquête de la GRC pour s’être fait remboursé des dépenses inadmissibles. Le sénat lui réclame plus de 100 000$, incluant des frais d’avocats. En 2006, il a été exclu du caucus libéral le temps que l’enquête se termine. En août 2007, il a formellement été accusé de fraude, d'abus de confiance et d'entrave à la justice.

En 2007, la rumeur circulait que, si M. Lavigne ne se présentait pas lui-même comme candidat libéral aux élections fédérales, il proposerait Mme Hamel. « Certains pensent par contre qu'à défaut de se présenter lui-même, le sénateur voudrait démontrer qu'il est en contrôle de la circonscription pour mieux imposer une candidature de son choix. Le nom de Line Hamel, présentement conseillère municipale pour Vision Montréal dans l'arrondissement du Sud-Ouest, circule abondamment », écrivait alors Hélène Buzzetti du quotidien Le Devoir (« Raymond Lavigne lorgne la circonscription de Jeanne-Le Ber », 28 février 2007).

Bisbilles locales


En 2006-2007, une autre histoire avait mis Mme Hamel sous le devant des projecteurs. Elle et ses deux collègues de Vision Montréal ont fait toutes les manœuvres possibles pour faire réintégrer dans ses fonctions un employé de l’arrondissement qui avait été déplacé à la ville-centre suite à plusieurs plaintes d’harcèlement psychologique portées devant les tribunaux administratifs. Le monsieur en question avait été placé là par Pierre Bourque en 2002 et Mme Hamel avait voté pour. Un bras de fer s’est joué à l’été 2007 au conseil d’arrondissement Sud-Ouest alors que les trois élus de Vision Montréal tentent de faire réintégrer le monsieur. Ils et elle finiront par abandonner leur projet à la suite de menaces de poursuites de la ville-centre, qui dispose d’une politique contre le harcèlement en milieu de travail.

Par ailleurs, les éluEs du Sud-Ouest ne semblent pas trop se préoccuper des conflits d’intérêt. En 2007 a été voté un controversé projet, celui de permettre des terrasses sur la rue Monk. Les trois conseillers de Vision Montréal ont croisé le fer avec les deux d’Union Montréal sur ce sujet pendant plusieurs mois. Finalement le projet a été voté, les trois de Vision Montréal étant majoritaires. Sauf que…le conseiller Jean-Yves Cartier n’a pas mentionné que son fils était copropriétaire d’un bar qui allait directement bénéficier de la mesure. Il n’a pas jugé bon se retirer lors du vote…

Le retour du même


Il semblerait que, en politique municipale, conflits d’intérêts et apparence de conflits d’intérêt ne signifient rien :

« Le juge a aussi modifié les conditions que l'accusé doit respecter. Michel Hamel disait qu'en tant qu'organisateur politique de sa fille, des élections s'en venant, il ne pourrait l'aider sans rompre ses conditions actuelles. Le juge Boisvert a accepté que M. Hamel puisse contacter les conseillers Jean-Yves Cartier et Ronald Bossy à partir du 1er avril. "Je ne suis pas sûr que ça va aider que monsieur aide sa fille", a glissé le juge. »

(Extrait de l’article de Eric Clément, voir ci-bas)

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M.S.
Agence de presse libre de la Pointe

Enquête préliminaire de Michel Hamel


Tentatives d'extorsion enregistrées

Éric Clément
La Presse, vendredi, 9 janvier 2009, p. A6

L'enquête préliminaire de Michel Hamel, père et organisateur politique de la conseillère municipale de Sud-Ouest, Line Hamel, a eu lieu, hier, au palais de justice de Montréal, dans le cadre des accusations de fraude et de trafic d'influence portées contre lui en 2007: le témoin principal a raconté qu'il avait enregistré les tentatives d'extorsion de M. Hamel.

L'ingénieur Jean-Jacques Rousseau, ex-propriétaire de l'édifice RCA Victor, de la rue Lenoir, a témoigné devant le juge Serge Boisvert. C'est lui qui a porté plainte à la SQ. Michel Hamel lui aurait demandé 75 000$ pour l'aider à obtenir l'accord de l'arrondissement pour transformer cet édifice en un immeuble de commerces et d'appartements.

M. Rousseau a dit que Mme Hamel, présidente du comité consultatif d'urbanisme (CCU) qui évalue les projets immobiliers de l'arrondissement, était enthousiaste en 2003 quand il lui avait présenté la version initiale du projet. Les choses se sont gâtées par la suite. Les élus de Vision Montréal ont mis des bâtons dans les roues du projet, demandant notamment des études supplémentaires. Leurs objections étaient "farfelues", a dit M. Rousseau. Il a alors été contacté par téléphone en 2004 par le "contracteur Claude Vaudrin". "Il m'a dit "ton projet est bloqué à la Ville, écoute j'ai quelqu'un qui peut t'aider, t'as pas le choix, ça passera pas sans ça"".

Le 12 novembre 2004, M. Vaudrin lui fait rencontrer Michel Hamel, qui au début est présenté comme "Monsieur Michel". Jean-Jacques Rousseau a raconté ses trois rencontres avec M. Hamel dans une taverne, rencontres qu'il enregistrait, car il trouvait "ça louche".

"Il m'a dit qu'il avait déjà amorcé des discussions avec un des conseillers de l'époque", a dit M. Rousseau qui a identifié ce conseiller comme étant Robert Bousquet. Le procureur général, Céline Bilodeau, a produit les photocopies du napperon de papier sur lequel M. Rousseau et M. Hamel ont griffonné des chiffres: "75 000$" et des "15 000$".

Après ces rencontres, M. Rousseau a refusé "le deal". Il a dit à M. Vaudrin et à M. Hamel que cet arrangement était "de nature criminelle". Il a attendu toutefois les élections municipales de 2005, espérant qu'un changement de majorité à l'arrondissement lui serait favorable. Mais ce changement n'a pas eu lieu.

Par la suite, Line Hamel et ses collègues se sont opposés à ce que le projet aille de l'avant, disant notamment qu'ils ne l'avaient pas assez étudié ou qu'il n'était pas "approprié". Du coup, il porte plainte à la SQ à l'été 2006, ce qui a conduit aux accusations portées contre M. Hamel. Écoeurés par toute cette histoire, M. Rousseau et son associé ont vendu l'édifice l'an dernier.

Normand Proulx, directeur Aménagement urbain de l'arrondissement, a aussi témoigné. Il a dit que Line Hamel avait dit, début 2006, que "de toute façon, je suis contre ce projet". Pendant le témoignage de M. Proulx, Michel Hamel avait la tête baissée et les yeux fermés.

Le juge a retiré le troisième chef d'accusation de fraude porté contre M. Hamel. Pour les deux autres chefs d'accusation, il risque un maximum de cinq ans de prison s'il est reconnu coupable.

Le juge a aussi modifié les conditions que l'accusé doit respecter. Michel Hamel disait qu'en tant qu'organisateur politique de sa fille, des élections s'en venant, il ne pourrait l'aider sans rompre ses conditions actuelles. Le juge Boisvert a accepté que M. Hamel puisse contacter les conseillers Jean-Yves Cartier et Ronald Bossy à partir du 1er avril. "Je ne suis pas sûr que ça va aider que monsieur aide sa fille", a glissé le juge.