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Déni de justice. Les turpitudes policières au Québec, cru 2006-2007Pas besoin d’être futé pour être gardien d’la paix
Suffit de savoir distinguer un type bizarre d’un honnête homme Pas besoin de cervelle pour porter un uniforme Suffit d’une mentalité d’flic Suffit d’être moustachu dans l’âme - René Binamé et les Roues de secours, La moustache, 1990
Pour le plus grand plaisir des partisan.ne.s de la loi et de l’ordre, les policier.ères perpétuent année après année l’ordre social conservateur grâce à leurs turpitudes matraquestes et leurs préjugés de macho.e.s blanc.he.s musclé.e.s.
2006 n’aura pas fait exception à la règle, la flicaille nous ayant montrée, d’une part, qu’elle est juste assez lobotomisée pour ne pas comprendre ce qui ne porte pas un uniforme et, d’autre part, juste assez conne pour quand même se servir d’un téléphone, noter une date de naissance, commander une pizza, conduire un char et tirer droit devant. Un paradoxe : la criminalité diminue (moins 19% depuis 1997), mais les effectifs policiers et les plaintes en déontologie policière augmentent (+ 13,8% (190 plaintes) entre 2001 et 2006). Bon voyage au pays de la moustache. La déontologie empêche le travail policier
Une statistique intéressante qui ressort du dernier rapport du Commissariat à la déontologie policière, le nombre de citations à comparaître devant le comité de déontologie a fait un bond extravagant en un an. Il faut savoir que la grande majorité des plaintes sont rejetées, abandonnées ou réglées en conciliation. Seules un petit nombre font l’objet d’une enquête supplémentaire pouvant mener à des citations à comparaître. Ainsi, en 2005-2006, sur 201 policiers ayant fait l’objet d’une enquête, 119 furent cités à comparaître dans 73 dossiers. C’est une augmentation de 45% du nombre de dossiers et de 35% du nombre de policiers par rapport à l’année précédente. Le Commissariat a beau dire que plus de préposé.e.s ont été affecté.e.s à l’enregistrement des plaintes, cette augmentation des cas cités à comparaître signifie que les plaintes considérées « sérieuses » sont de plus en plus nombreuses. Répression politique : the show must go on
![]() ![]() Quelques nouvelles relatives à la manifestation de 2002. Dans 5 procès différents, la majorité des accusé.es bénéficient d’un non-lieu. Malgré tout, les procureurs de Montréal ont logé appel dans tous les cas. Alex Popovic l’« éternel accusé », dans un billet publié sur La Tribu du Verbe, écrit : « Combien de millier de dollars de fonds publics […] les procureurs de la ville vont-ils encore dilapider afin de ‘magasiner’ un juge qui accepte de nous déclarer finalement coupable? » Une très bonne nouvelle: un cas manifeste de répression politique brutale se termine en février 2006 par l’acquittement de méfait de la vingtaine de sans-papiers algériens qui avaient occupé les bureaux du ministère de l’immigration à Ottawa (29mai03). Le 7 mars, ils intentent une poursuite en déontologie policière. Considérant le vidéo tourné par la police (autrefois disponible sur le web...), où l’on voit directement les tasers utilisés pour ‘calmer’ des hommes qui ont les mains en l’air ou sont déjà couchés par terre, leurs chances sont bonnes que la plainte soit au moins retenue… ![]() Sur un autre front, les masses critiques sont des manifestations de cyclistes qui se tiennent une fois par mois à Montréal. La police est habituellement tolérante, mais ça dépend des flicon.ne.s en question. Le 25 août dernier, au début du week-end du Grand Prix Champ Car, des flics à bicyclette applaudissent la masse critique qui passe sur Ste-Catherine. Mais des collègues en bagnole ne le prennent pas du même air et décident, après 10 minutes de sirènes et de gueulage dans leur micro, de procéder à l’arrestation de 3 cyclistes dangereux qui distribuaient des tracts subversifs sur le fait que le char pollue. En passant, Jaggi Singh a été arrêté au moins trois fois en 2006, sa moyenne se maintient. Il a même échappé à deux détentions préventives. Au cours de l’année s’est aussi déroulé un jeu du chat et de la souris (de laboratoire) alors que le groupe de défense des droits des animaux Stop Huntington Animal Cruelty (SHAC) a fait se déplacer les flics une vingtaine de fois au cours de l’année (La Presse, 27-11-06). La course s’est terminée le 26 novembre dans les rues de Westmount quand le groupe, fidèle à son mode d’action, dénonçait un dirigeant de compagnie devant sa maison. Treize arrestations pour avoir troublé la paix, aucune pour élever des chats modifiés génétiquement en laboratoire. On ne peut pas dire que les flics se restreignent à l’extrême-gauche dans leur répression : toute action turbulente est passible de matraquage. En juin 2006, probablement encore sous le choc de la tentative d’aller chercher les textes de la ZLÉA directement chez le ministre en 1999, les flics d’Ottawa ont pris les grands moyens et ont arrêtés des dizaines de syndiqués de Postes Canada qui voulaient entrer au siège social pour aller chercher les dossiers sur l’avenir de l’institution, que refuse de leur donner la direction.
Pow pow té mort
Au moins cinq autres personnes sont décédées lors d’interventions policières, dont une femme d’Ottawa tombée du 6e étage alors que les flics sont chez elle. Trois autres sont mortes suite à des poursuites policières en voiture, pratique généralement contestée car dangereuse et souvent relative à des infractions mineures. Par exemple, en 2006 une policière de Matane est blâmée pour avoir poursuivie un citoyen pour des raisons mineures, le tout se terminant en face à face et mort du fuyard. Entre 1993 et 2003, 46 décès sont liés à des poursuites policières. Quelques décisions favorables à la flicaille : la Commission des plaintes du public contre la GRC affirme qu’un agent qui a tué un citoyen en 2005 avait raison de le faire. On sait pas trop pourquoi, parce que le rapport d’enquête n’est pas disponible sur le site web où on renvoie les journalistes… En 2005, un étudiant intoxiqué à la coke et aux amphis a été brutalement arrêté par une escouade sur son lieu de résidence à l’Université Laval. Projeté dans le bain, maintenu sous une couverture et aspergé de poivre, il mourra à l’hôpital deux jours plus tard sans que sa famille ne soit avertie. Suite à l’enquête interne, il semblerait qu’à cause de son état physique, les méthodes policières étaient justifiées. Donc, « circulez, y’a plus rien à voir ». Racisme et profilage ethnique
Cette appellation officielle de « profilage racial » constitue selon moi un cas de racisme institutionnel patent. L’expression a été consacrée par une première décision judiciaire en 2005. La Commission des Droits de la personne a ensuite demandé des avis juridiques avant de rendre elle-même une première décision concluant à l’utilisation de « profilage racial » par deux agents du métro de Montréal. La déontologie policière a aussi utilisé la notion en 2006. Il est beaucoup plus juste d’utiliser le terme « profilage ethnique » plutôt que « racial », considérant qu’il n’y a pas de race humaine, mais bien une espèce qui n’est pas divisée en races, mais en groupes ethniques. Bref, depuis que les plaintes se multiplient auprès de la Commission des Droits de la personne et du Commissaire à la déontologie policière, la police de Montréal s’est votée une politique contre le profilage ethnique et a formé ses cadres aux enjeux des relations inter-ethniques. Le problème, c’est les constables et patrouilleur.e. : « Ce n'est pas adapté à nos agents. C'est une formation trop théorique pour eux », selon le directeur-adjoint du SPVM Yves Charrette (La Presse, 23-3-06). Le cas du flic chansonnier montre à quel point les préjugés racistes sont bien ancrés. En vérité, si le gnouf n’avait pas été flic, la chanson aurait passé comme dans du beurre… Toujours est-il que la rock star est passée devant le comité interne du SPVM pour savoir s’il n’avait pas enfreint son code de travail policier. Il semblerait que non, parce que Monsieur n’était pas en service quant il a composé et diffusé sa chanson raciste. Il semblerait qu'il soit capable de mettre au vestiaire ses convictions raciales avant d’enfiler son bel uniforme bleu.
Surgi alors Mohamed, sortant de la mosquée avec son turban et sa djellabah... Selon le rapport officiel de la police, Mohamed les aurait attaqué, sans raison précise, avec un couteau. Un des troufions aurait été blessé (mais n'a pas été hospitalisé). Bref, sentant sa vie en danger, le flicon tire deux fois et atteint Mohamed d'une balle au coeur et l'autre à l'abdomen. L'enquête fut confiée au Service de police de Québec et à un procureur de Rimouski, lesquels concluent, 11 mois plus tard, qu'il n'y a pas lieu de porter des accusations contre les flics. Plusieurs points d'ombres demeurent: la famille ne croit pas que ce soit dans les habitudes de Mohamed de se promener avec un couteau, et encore moins de l'amener à la mosquée. De plus, l'avocat de la famille n'a pas eu droit de regard sur la preuve, car il n'y a pas D'accusation criminelle portée: tout le dossier demeure donc interne, caché à la population. Cela inclut le supposé couteau ainsi qu'une bande vidéo d'une caméra de surveillance qui aurait filmé la scène... S'agit-il d'un cas de profilage ethnique (d'autant plus que l'opération de ce matin-là visait des supposés "terroristes algériens") S'agit-il du camouflage d'une bavure? S'agit-il, encore, d'un cas d'omertà dans la police? Vous devrez vous faire votre propre opinion sans avoir accès à plus d'informations, car le dossier est clos, circulez, y'a rien à voir! Un cas trouble d’influence, d’enquête bâclée, de domination masculine et de profilage![]() 1. les flics sont-ils allés trop vite en arrêtant 4 personnes alors que les soupçons sont faibles? Y-a-t-il eu profilage ethnique dans ce cas? Brutalité policière et utilisation d’une force excessive
Le cas de l’arrestation brutale de la fille Péladeau est aussi revenu dans l’actualité d’une façon qui serait cocasse si elle n’était pas pathétique. Les policiers impliqués sont suspendus en février 2006 et accusés de voies de fait. Ils ripostent en novembre en poursuivant Péladeau pour 1,5 millions $, parce que ses déclarations dans les médias leurs aurait causé préjudice ! L’abus de pouvoir vient avec l’uniformeLes abus de pouvoir et d’autorité de la part de ceux et celles qui sont supposé.e.s défendre la loi sont monnaie courante. Il s’agit souvent de petites pratiques mesquines pour épargner du temps et des efforts, tout en se basant sur l’uniforme et l’autorité. On arrête des gens sans mandat, on donne des amendes trop élevées, on porte des accusations sans fondement, on se place en conflit d’intérêt, on fouille dans les fichiers à son profit, on sniffe de la coke saisie, on fait des faux témoignages, bref : chaque année apporte son lot de manquement aux articles 5 et 6 du Code de déontologie des matraqueurs assermentés : « le policier doit se comporter de manière à préserver la confiance et la considération que requiert sa fonction » (38% des plaintes); « Le policier doit éviter toute forme d’abus d’autorité dans ses rapports avec le public » (34% des plaintes du public) Star académie de police![]() Ce type de situation se multiplie. Des plaintes ont déjà été déposées par des citoyen.ne.s filmé.e.s lors de perquisitions ou de descentes. Dans le cas des saisies de cannabis, y’a jamais personne pour se plaindre des caméras de télé. Il est vrai que l’intervention policière est un sujet qui marche à la télé : il constitue l’essentiel des bulletins d’information de TQS, de TVA et même de la chic SRC. Les journalistes assiègent les suspects et leurs familles (souvenez-vous des plaintes de la famille de Kimveer Gill à l’encontre du harcèlement des journalistes), on cherche la petite bête, on montre la gueule de raie des suspects en gros plans, etc. En vérité, la brutalité et les bavures policières, dans le monde médiatique d'aujourd'hui - pro-répression, pro-violence et totalement sensationnaliste - n’est pas prête de disparaître: ça vend. C'est ça que le peuple veut. Marco Silvestro D’autres textes sur les mêmes sujets :Bruno Dubuc, 2006, Business as usual. Jaggi Singh échappe à nouveau au harcèlement policier Francis Dupuis-déri, 2006, L’ONU blâme la police de Montréal Francis Dupuis-Déri, 2002, Constat d'infraction aux droits et libertés. Retour sur la répression policière du 26 avril à Montréal Marco Silvestro, 2002, Des flics qui tapent plus fort et qui pensent moins Marco Silvestro, 2004, La liste annuelle des coups, crosses et autres excès policiers Marco Silvestro, 2005, La liste annuelle des matraquages, arrestations politiques et autres dérives de la flicaille québécoise, 2004-2005 Marco Silvestro, 2005, Les dérives de la flicaille québécoise, 2004-2005 - 2e partie: Broyer du Noir - Racisme et profilage ethnique Marco Silvestro, 2005, Profilage social dans les rues montréalaises. Boutons les putes hors de l’île Marco Silvestro, 2006, Sentiment de puissance et d’impunité. Les frasques policières, 2005-2006 COBP, 2006, Compte-rendu de la 10ième manifestation contre la brutalité policière à Montréal COBP, 2006, Affaire Mohamed Anas: Un policier tue un jeune marocain à Côte-Des-Neiges COBP, 2006, Affaire Mohamed Anas Bennis, 11 mois plus tard... COBP, 2007, Bilan des crimes officiels de la police de Montréal et des grouinements de la Fraternité en 2006 autres textes | 6153 lectures
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